Nous nous réveillons émerveillés (mais surtout fatigués) au pied du massif du M’Goun. La journée commence par la remontée d’un canyon empruntant un chemin escarpé. On se croirait téléportés en Arizona.
Puis on traverse en vélo des plateaux d’altitude désertiques aux reliefs variés avant d’engager une descente technique qui mène vers l’immense vallée du M’Goun.
Il fait bien trop chaud et nous commençons la descente sans aucune protection, pas même un casque ou une paire de gants (mais bon, on ne mettra pas de photo, sous peine de nous attirer les foudres des si nombreux VTTistes sécuritaires – mais qui s’éclatent quand même à regarder le Red Bull Rampage 😉 On a les vélos bien en mains, on est en forme. Mais devant la difficulté qui s’accentue sérieusement et devant le terrain qui devient méchamment rocheux, nous finissons tout de même par enfiler le casque.
Nous remontons ensuite en pédalant (bin oui, on a quand même pédalé un peu dans tout ça) l’immense vallée plate qui mène au pied de la montagne objectif de notre expédition.
Un berger nous hèle de loin ; je crois qu’il veut nous vendre un mouton mais en fait, il veut tester mon vélo. Je le lui laisse, curieux. Mais il n’a manifestement jamais eu entre les mains un vélo de DH. En plus, le mien est réglé spécialement pour la descente avec la selle vraiment basse et très inclinée. Du coup, il ne parvient même pas à tenir sur la bécane, manque de chuter à l’arrêt et me le rend l’air de dire : « C’est quoi c’t’engin ?Vous êtes tarés les mecs ! »
Après plusieurs kilomètres et alors que je commence à avoir mal aux genoux à force de pédaler en crapaud, nous faisons une pause à côté du refuge Tarkeddit, base de départ de la voie normale du pic du M’Goun. Mais alors que le coin est rempli de trekkeurs en temps normal, nous n’y trouvons personne. Pour cause de terrorisme évidemment, nous sommes en juillet 2016. Pourtant, de façon factuelle, le risque est plus élevé en France qu’au Maroc… Mais laissons de côté les questions sociétales… Nous profitons de cet arrêt pour faire la purge de mes freins qui commencent à avoir une garde beaucoup trop souple à mon goût. Ce genre de manip à 3000 m n’est pas monnaie courante !
Puis Lhoucine nous indique la vallée d’altitude dans laquelle nous établirons le campement et nous dit qu’on peut partir devant avec nos vélos et que les mules nous rattraperont.
Deux heures plus tard, alors que l’orage est arrivé et que nous sommes seuls à 3600 m d’altitude, les mules ne nous ont toujours pas rejoints.
Plus les jours passent, plus on s’adapte à l’altitude et plus on a la caisse ! On décide donc de s’amuser dans le tout nouveau terrain de jeu qui nous entoure, à savoir la lune. Car le paysage est vraiment lunaire, entièrement composé de pierres noires abrasives. Plus un seul végétal n’est visible. On se croirait dans le cratère d’un volcan. Partout, des lignes de rides se déploient, toutes plus fun les unes que les autres. Mais ça n’en est que plus frustrant car les pierres sont du même type que sur le Tignousti, c’est-à-dire extrêmement tranchantes. Nous allons devoir faire attention où nous posons les roues. Autant dire qu’il est inenvisageable d’envoyer vraiment la sauce et de prendre de l’angle.
Nous engageons néanmoins quelques lignes sympathiques sur la pointe des roues, en priant qu’une arête tranchante n’égorge pas le tubeless tout neuf.
Nous comprenons vite que les zones de rochers les plus noirs sont les plus dangereuses et nous les évitons. Il faut également éviter la chute car nous n’avons que le casque et autant dire que le sol équivaut à une râpe à fromage soigneusement affûtée. Une fois les muletiers enfin arrivés et le camp établi, je pars faire une reco à pied pour trouver une ligne pour le lendemain.
Jour 6 / Sur le fil du rasoir
Aujourd’hui c’est day off ! Pour la première fois, nous laissons le camp établi au même endroit ; on peut donc faire les fous autour. Nous nous lançons dans l’ascension d’un sommet sans nom à 3980 m, sur la chaîne de montagne du M’Goun, avec la ferme intention d’enchaîner une longue arête vertigineuse qu’on voit depuis le camp.
Nous atteignons sans grande difficulté le pic, même s’il m’est impossible de suivre Dimitri qui monte à la vitesse vertigineuse de 800 m/h (en dénivelée, évidemment). Déjà, à 2000 m d’altitude, c’est énorme. Alors à 4000… Même Lhoucine qui passe pourtant sa vie à faire de la montagne a du mal à le suivre. Au sommet, le paysage est grandiose. Ici tout est en roche, donc tout me plait.
Nous poursuivons un petit kilomètre sur l’arête principale avant de parvenir à l’arête secondaire que nous avons repérée. Lhoucine tente de nous dissuader d’y aller : d’abord, l’attaque est très raide, 300 m aux alentours de 40°. Ensuite, l’arête est très escarpée et recouverte des rochers tranchants que nos pneus aiment tant. Mais le problème majeur est qu’une fois engagés dessus, nous serions coincés par des falaises de part et d’autre du fil et aucun demi-tour ou itinéraire bis ne serait envisageable. On ne peut pas voir l’intégralité de la descente mais on devine qu’il faut faire quelques pas d’escalade par endroit. Néanmoins, ça semble passer en vélo. Bref, c’est l’arête ultime de bike haute montagne !
Un vent violent commence à se lever, il ne faut pas tarder. Sans hésiter, on s’engage. Les photos se suffisent à elles-mêmes pour décrire la descente :
Et après une grosse crevaison (pour ma gueule, comme d’habitude), retour au camp et réouverture de l’atelier mécanique.
Jour 7 / 4000 m, enfin
Ascension du pic du M’Goun. La fin de la montée s’avère compliquée pour moi du fait d’une ascension trop rapide. Il faut dire que faire du 800 m/h à ces altitudes, c’est un peu jouer avec le feu. Arrivé vers 4000 m, j’ai ressenti un gros malaise, des nausées et des pertes d’équilibre. J’ai été forcé de m’arrêter un moment me reposer avant de trouver la force de repartir. Ça faisait longtemps qu’une telle chose ne m’étais pas arrivée ! De plus, il faut préciser qu’une fois atteint les 4000, nous ne sommes pas du tout au sommet ; nous devons ensuite enchaîner 4 km d’arête à cette altitude. Le terrain n’est pas difficile, mais c’est quand même 4 km à 4000 m !
En une heure, nous atteignons néanmoins les 4071 m du pic. Le 3ème sommet de l’Atlas, enfin !
Un guide prénommé Rachid se trouve au sommet avec ses clients ; il nous regarde débarquer avec nos vélos, l’air éberlué.
« Par où vous descendez ? » nous demande-t-il. En haute montagne, le piéton pose toujours la même question au cycliste… Toujours. On lui indique la face ouest, directement sous le sommet. « C’est impossible ! assène-t-il sûr de lui. Vous ne pourrez pas le faire à vélo !« . Encourageant…
Nous regardons plus attentivement la face qui se déploie en contrebas. 500 m ininterrompus, entre 30 et 40°, essentiellement dans du pierrier fin, un terrain que je maitrise parfaitement du fait de mes nombreux rides à vélo dans la neige. Petites pierres ou neige, c’est pareil quand il y a de la pente : il faut y aller en godille, sans hésitation, tout le poids en arrière.
Si Rachid savait… S’il était dans notre tête, il saurait que non seulement, nous allons le faire, mais qu’en plus, nous n’avons pas la moindre appréhension. Après tant de galère, tant de montées, tant de distance parcourue et tant de problèmes techniques résolus, c’est du pur bonheur qui nous attend là ! De l’adrénaline à l’état brut.
Et on se lance !
La majeure partie est aisément descendable en mode godille. Néanmoins, certaines portions de la face sont vraiment raides, si raides que les cailloux n’y tiennent plus, laissant le sol nu. Cela devient alors extrêmement technique car les freinages deviennent grandement inefficaces sur la sous-couche poussiéreuse.
Nous descendons l’intégralité de la face sur le vélo !
Plus bas, alors que la pente s’adoucit, nous pouvons enfin lâcher les freins et descendre à toute blinde le sentier à flanc de vallée.
Nous nous amusons un peu dans des reliefs sculptés par l’érosion mais devons bientôt accélérer le mouvement car l’orage éclate.
Comme tous les jours, nous arrivons donc au camp sous une pluie battante. Qui a dit que le Maroc était un pays désertique ?
Dernière péripétie de la journée, Dimitri se fait attaquer par une meute de quatre chiens de berger complètement sauvages ; il est cerné de toutes parts, en train de se défendre vaillamment à l’aide de son vélo (l’empattement large du Mondraker a enfin trouvé son utilité) lorsque Mustafa – Chuck Norris arrive, un bâton à la main, et lui sauve les fesses in extremis.
Jour 8 / This is the end…
Peu de choses à dire sur le dernier jour, si ce n’est une ascension un plus raide et plus fun que les précédentes, avec 300 m d’escalade facile… mais sans corde.
Les muletiers ont pris un autre sentier et nous amènent nos vélo de l’autre côté de la crête, au sommet de l’Igoudamen (3600 m environ).
S’ensuit une descente raide et technique avant d’atteindre un paysage de genévriers millénaires poussant dans des collines désertiques.
Dernier plaisir : nous envoyons de la vitesse dans la poussière et les graviers. Dernière crevaison. Puis nous arrivons enfin au fond de la vallée de Ait Bouguemez. La « vallée heureuse », comme l’appellent les Berbères du coin. Et nous aussi nous sommes heureux parce que nous n’avons plus de pneus, plus de chambres à air, plus de cartouche de CO2 et plus beaucoup d’énergie… Nous avons utilisé notre dernière cartouche, la bombe anti-crevaison, pour ce dernier trou.
Mustafa – Chuck Norris, avec qui on a bien rigolé tout du long du séjour malgré la chute de sa mule et sa piqure de scorpion, nous fait l’honneur de nous inviter chez lui. Ce n’est que le lendemain soir que nous pourrons enfin prendre notre première douche, après 9 jours intenses.
Bilan :
Au final, cette expédition au Maroc a été une sacrée expérience, tant humaine que sportive et également technique, puisque nous avons passé pas moins de deux heures de maintenance mécanique chaque soir afin de garder les bikes en état.
Quelques conseils pour ceux qui souhaiteraient s’engager dans un périple similaire (autant que notre expérience puisse servir à d’autres) :
Attention à bien choisir votre équipe et votre guide. Nous avons discuté avec d’autres guides au cours de notre voyage et beaucoup connaissent mal les contraintes de la montagne. Alors quant à parler de celles du VTT… Donc quoi qu’il en soit, établissez précisément l’itinéraire avec lui sur des cartes. Vous pouvez aussi vous baser sur des photos : les guides en ont tous dans leurs téléphones. C’est donc assez simple de vérifier qu’une zone est intéressante ou pas à vélo.
Pour l’itinéraire, attention aux distances : ne vous dites pas « c’est cette zone est plate, on va la passer à vélo vite fait« . Souvent, les plateaux à haute altitude ne sont pas roulables (buissons, reliefs rocheux…). Et du coup, la conséquence est exactement inverse : vous devrez vous taper ces replats à pied, en portant le vélo. Et ils deviendront les portions les plus longues.
Le terrain est hyper violent pour les vélos. Entre 3000 et 3500 m, il est hérissé de buissons épineux plus proche du cactus que du buisson. Au-dessus, les cailloux sont incroyablement tranchants. Et partout, de la poussière fine qui s’infiltre dans les parties mécaniques. Tubeless obligatoire avec beaucoup de préventif. Et montez de gros pneus de DH, tant pis pour le surpoids… Pour info, des Schwalbe Nobby Nic et même des Magic Mary neufs n’ont pas suffi. Du coup, prenez également une pompe à pied pour pouvoir remonter du tubeless. Même si ça prend de la place, c’est indispensable.
A aucun moment nous n’avons eu le sentiment d’être en insécurité, même dans le contexte islamique actuel. Le Maroc est un pays sommes toutes modéré, les musulmans n’y défendent pas l’intégrisme. L’extrémisme religieux se ressent plus en France qu’au Maroc. Mais c’est un grand débat…
Attention néanmoins à l’isolement : s’il vous arrive le moindre accident, vous devrez d’abord revenir à dos de mule à la route la plus proche (ou sur un brancard si la zone est trop escarpée). Puis vous aurez ensuite une dizaine d’heures de voiture jusqu’à Marrakech. Cela fait au minimum (et c’est vraiment le minimum) deux jours avant d’atteindre un hôpital. Si vous avez une fracture ouverte, vous trouverez le temps long !
Nicolas Chauffier et Jeremy Ferey du team LUCKY BOY sur l’un des plus beau spot d’Ile de France, le mont Ganelon! Production – Lucky Boy Montage & caméra – Poirier Jean-Pascal Rider – Nicolas Chauffier, Jeremy Ferey Spot – Mont Ganelon, Ile de France
Retour en images sur ROC D’AZUR 2015, l’un des événements majeur en Europe ces dernières années. Rendez-vous le 5 Octobre prochain pour l’édition 2016. Inscription pour l’édition 2016 à partir du 25 février, restez connecté : http://www.rocazur.com/fr Credits – Rocazur & Gomera Production
Les forêts côtières de Colombie-Britannique sont connues pour être certaines des plus luxuriantes et majestueuses forets dans le monde, mais cet été les choses ont changée. Après des mois sans pluie en BC les choses ont mal tournées. Il est pas rare de voir des feux de forêt durant l’été en Colombie-Britannique, mais c’est généralement …
A tout juste 10 ans, Bodhi Kuhn s’envoie un saut de 10 mètres sur la piste Joy Division, sur le spot Woopidydoo à Rossland, en Colombie-Britannique. Bodhi Kuhn a tout d’un futur grand athlète, il aime tout ce qui est extrême, notamment le ski freeride durant l’inter-saison. Un début de carrière très prometteur, pour le …
4000 M RIDE – PARTIE 2
Ceci est la suite (et fin) de l’article suivant : http://www.ilovebicyclette.com/2016/09/10/4000-m-ride-partie-1/
Jour 5 / Alunissage
Nous nous réveillons émerveillés (mais surtout fatigués) au pied du massif du M’Goun. La journée commence par la remontée d’un canyon empruntant un chemin escarpé. On se croirait téléportés en Arizona.
Puis on traverse en vélo des plateaux d’altitude désertiques aux reliefs variés avant d’engager une descente technique qui mène vers l’immense vallée du M’Goun.
Il fait bien trop chaud et nous commençons la descente sans aucune protection, pas même un casque ou une paire de gants (mais bon, on ne mettra pas de photo, sous peine de nous attirer les foudres des si nombreux VTTistes sécuritaires – mais qui s’éclatent quand même à regarder le Red Bull Rampage 😉 On a les vélos bien en mains, on est en forme. Mais devant la difficulté qui s’accentue sérieusement et devant le terrain qui devient méchamment rocheux, nous finissons tout de même par enfiler le casque.
Nous remontons ensuite en pédalant (bin oui, on a quand même pédalé un peu dans tout ça) l’immense vallée plate qui mène au pied de la montagne objectif de notre expédition.
Un berger nous hèle de loin ; je crois qu’il veut nous vendre un mouton mais en fait, il veut tester mon vélo. Je le lui laisse, curieux. Mais il n’a manifestement jamais eu entre les mains un vélo de DH. En plus, le mien est réglé spécialement pour la descente avec la selle vraiment basse et très inclinée. Du coup, il ne parvient même pas à tenir sur la bécane, manque de chuter à l’arrêt et me le rend l’air de dire : « C’est quoi c’t’engin ? Vous êtes tarés les mecs ! »
Après plusieurs kilomètres et alors que je commence à avoir mal aux genoux à force de pédaler en crapaud, nous faisons une pause à côté du refuge Tarkeddit, base de départ de la voie normale du pic du M’Goun. Mais alors que le coin est rempli de trekkeurs en temps normal, nous n’y trouvons personne. Pour cause de terrorisme évidemment, nous sommes en juillet 2016. Pourtant, de façon factuelle, le risque est plus élevé en France qu’au Maroc… Mais laissons de côté les questions sociétales… Nous profitons de cet arrêt pour faire la purge de mes freins qui commencent à avoir une garde beaucoup trop souple à mon goût. Ce genre de manip à 3000 m n’est pas monnaie courante !
Puis Lhoucine nous indique la vallée d’altitude dans laquelle nous établirons le campement et nous dit qu’on peut partir devant avec nos vélos et que les mules nous rattraperont.
Deux heures plus tard, alors que l’orage est arrivé et que nous sommes seuls à 3600 m d’altitude, les mules ne nous ont toujours pas rejoints.
Plus les jours passent, plus on s’adapte à l’altitude et plus on a la caisse ! On décide donc de s’amuser dans le tout nouveau terrain de jeu qui nous entoure, à savoir la lune. Car le paysage est vraiment lunaire, entièrement composé de pierres noires abrasives. Plus un seul végétal n’est visible. On se croirait dans le cratère d’un volcan. Partout, des lignes de rides se déploient, toutes plus fun les unes que les autres. Mais ça n’en est que plus frustrant car les pierres sont du même type que sur le Tignousti, c’est-à-dire extrêmement tranchantes. Nous allons devoir faire attention où nous posons les roues. Autant dire qu’il est inenvisageable d’envoyer vraiment la sauce et de prendre de l’angle.
Nous engageons néanmoins quelques lignes sympathiques sur la pointe des roues, en priant qu’une arête tranchante n’égorge pas le tubeless tout neuf.
Nous comprenons vite que les zones de rochers les plus noirs sont les plus dangereuses et nous les évitons. Il faut également éviter la chute car nous n’avons que le casque et autant dire que le sol équivaut à une râpe à fromage soigneusement affûtée. Une fois les muletiers enfin arrivés et le camp établi, je pars faire une reco à pied pour trouver une ligne pour le lendemain.
Jour 6 / Sur le fil du rasoir
Aujourd’hui c’est day off ! Pour la première fois, nous laissons le camp établi au même endroit ; on peut donc faire les fous autour. Nous nous lançons dans l’ascension d’un sommet sans nom à 3980 m, sur la chaîne de montagne du M’Goun, avec la ferme intention d’enchaîner une longue arête vertigineuse qu’on voit depuis le camp.
Nous atteignons sans grande difficulté le pic, même s’il m’est impossible de suivre Dimitri qui monte à la vitesse vertigineuse de 800 m/h (en dénivelée, évidemment). Déjà, à 2000 m d’altitude, c’est énorme. Alors à 4000… Même Lhoucine qui passe pourtant sa vie à faire de la montagne a du mal à le suivre. Au sommet, le paysage est grandiose. Ici tout est en roche, donc tout me plait.
Nous poursuivons un petit kilomètre sur l’arête principale avant de parvenir à l’arête secondaire que nous avons repérée. Lhoucine tente de nous dissuader d’y aller : d’abord, l’attaque est très raide, 300 m aux alentours de 40°. Ensuite, l’arête est très escarpée et recouverte des rochers tranchants que nos pneus aiment tant. Mais le problème majeur est qu’une fois engagés dessus, nous serions coincés par des falaises de part et d’autre du fil et aucun demi-tour ou itinéraire bis ne serait envisageable. On ne peut pas voir l’intégralité de la descente mais on devine qu’il faut faire quelques pas d’escalade par endroit. Néanmoins, ça semble passer en vélo. Bref, c’est l’arête ultime de bike haute montagne !
Un vent violent commence à se lever, il ne faut pas tarder. Sans hésiter, on s’engage. Les photos se suffisent à elles-mêmes pour décrire la descente :
Et après une grosse crevaison (pour ma gueule, comme d’habitude), retour au camp et réouverture de l’atelier mécanique.
Jour 7 / 4000 m, enfin
Ascension du pic du M’Goun. La fin de la montée s’avère compliquée pour moi du fait d’une ascension trop rapide. Il faut dire que faire du 800 m/h à ces altitudes, c’est un peu jouer avec le feu. Arrivé vers 4000 m, j’ai ressenti un gros malaise, des nausées et des pertes d’équilibre. J’ai été forcé de m’arrêter un moment me reposer avant de trouver la force de repartir. Ça faisait longtemps qu’une telle chose ne m’étais pas arrivée ! De plus, il faut préciser qu’une fois atteint les 4000, nous ne sommes pas du tout au sommet ; nous devons ensuite enchaîner 4 km d’arête à cette altitude. Le terrain n’est pas difficile, mais c’est quand même 4 km à 4000 m !
En une heure, nous atteignons néanmoins les 4071 m du pic. Le 3ème sommet de l’Atlas, enfin !
Un guide prénommé Rachid se trouve au sommet avec ses clients ; il nous regarde débarquer avec nos vélos, l’air éberlué.
« Par où vous descendez ? » nous demande-t-il. En haute montagne, le piéton pose toujours la même question au cycliste… Toujours. On lui indique la face ouest, directement sous le sommet. « C’est impossible ! assène-t-il sûr de lui. Vous ne pourrez pas le faire à vélo !« . Encourageant…
Nous regardons plus attentivement la face qui se déploie en contrebas. 500 m ininterrompus, entre 30 et 40°, essentiellement dans du pierrier fin, un terrain que je maitrise parfaitement du fait de mes nombreux rides à vélo dans la neige. Petites pierres ou neige, c’est pareil quand il y a de la pente : il faut y aller en godille, sans hésitation, tout le poids en arrière.
Si Rachid savait… S’il était dans notre tête, il saurait que non seulement, nous allons le faire, mais qu’en plus, nous n’avons pas la moindre appréhension. Après tant de galère, tant de montées, tant de distance parcourue et tant de problèmes techniques résolus, c’est du pur bonheur qui nous attend là ! De l’adrénaline à l’état brut.
Et on se lance !
La majeure partie est aisément descendable en mode godille. Néanmoins, certaines portions de la face sont vraiment raides, si raides que les cailloux n’y tiennent plus, laissant le sol nu. Cela devient alors extrêmement technique car les freinages deviennent grandement inefficaces sur la sous-couche poussiéreuse.
Nous descendons l’intégralité de la face sur le vélo !
Plus bas, alors que la pente s’adoucit, nous pouvons enfin lâcher les freins et descendre à toute blinde le sentier à flanc de vallée.
Nous nous amusons un peu dans des reliefs sculptés par l’érosion mais devons bientôt accélérer le mouvement car l’orage éclate.
Comme tous les jours, nous arrivons donc au camp sous une pluie battante. Qui a dit que le Maroc était un pays désertique ?
Dernière péripétie de la journée, Dimitri se fait attaquer par une meute de quatre chiens de berger complètement sauvages ; il est cerné de toutes parts, en train de se défendre vaillamment à l’aide de son vélo (l’empattement large du Mondraker a enfin trouvé son utilité) lorsque Mustafa – Chuck Norris arrive, un bâton à la main, et lui sauve les fesses in extremis.
Jour 8 / This is the end…
Peu de choses à dire sur le dernier jour, si ce n’est une ascension un plus raide et plus fun que les précédentes, avec 300 m d’escalade facile… mais sans corde.
Les muletiers ont pris un autre sentier et nous amènent nos vélo de l’autre côté de la crête, au sommet de l’Igoudamen (3600 m environ).
S’ensuit une descente raide et technique avant d’atteindre un paysage de genévriers millénaires poussant dans des collines désertiques.
Dernier plaisir : nous envoyons de la vitesse dans la poussière et les graviers. Dernière crevaison. Puis nous arrivons enfin au fond de la vallée de Ait Bouguemez. La « vallée heureuse », comme l’appellent les Berbères du coin. Et nous aussi nous sommes heureux parce que nous n’avons plus de pneus, plus de chambres à air, plus de cartouche de CO2 et plus beaucoup d’énergie… Nous avons utilisé notre dernière cartouche, la bombe anti-crevaison, pour ce dernier trou.
Mustafa – Chuck Norris, avec qui on a bien rigolé tout du long du séjour malgré la chute de sa mule et sa piqure de scorpion, nous fait l’honneur de nous inviter chez lui. Ce n’est que le lendemain soir que nous pourrons enfin prendre notre première douche, après 9 jours intenses.
Bilan :
Au final, cette expédition au Maroc a été une sacrée expérience, tant humaine que sportive et également technique, puisque nous avons passé pas moins de deux heures de maintenance mécanique chaque soir afin de garder les bikes en état.
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